Contrairement à Julien Lordinator qui comme moi est un fan de la première heure de la série Witchblade, je dois avouer que je craignais le pire en apprenant l’annonce d’un reboot total du titre par l’éditeur Top Cow il y a quelques mois de cela.
Quel intérêt me disais-je à l’époque de créer une nouvelle porteuse du gant magique si celle-ci ne devait avoir aucun lien avec un héritage qui existe depuis près de 20 ans. Comprendre que je devais renoncer à espérer lire la suite des aventures de Sara Pezzini et Danielle Baptiste était pour moi aussi absurde et injuste que de devoir renoncer à lire celles de Stephanie Brown et Cassandra Cain au moment de l’avènement des New 52 en 2011.
Pour moi ces héroïnes superbes, ces femmes indéniablement fortes qui ont su grandement évoluer au fil des années avaient encore beaucoup de choses à nous montrer, à partir du moment où un bon scénariste (à l’image de Ron Marz) était capable de s’occuper d’elles. Sara et Dani me manquent énormément, et c’est donc avec un certain ressenti que j’abordais et aborde encore cette all new all different version de Witchblade.
Encadrée par une équipe créative totalement féminine comprenant la romancière Caitlin Kittredge spécialisée dans les œuvres young adult de dark fantasy (et surtout connue dans le domaine des comics pour avoir écrit la série Coffin Hill parue chez Vertigo), et la dessinatrice italienne Roberta Ingranata (dont le style n’a plus de secret pour les habitués de l’éditeur Zenescope puisqu’elle y a officié sur Robyn Hood et Grimm Fairy Tales), cette nouvelle version de Witchblade emprunte du moins dans ce premier numéro une direction résolument féministe un peu trop appuyée pour être vraiment honnête.
Alex Underwood, la nouvelle détentrice du gant, ou plutôt du bracelet magique, vient ici précisément en aide aux victimes, en l’occurrence une femme battue qui a très peu de chance de faire le poids contre son mari, un officier de police sans reproche.
L’héroïne s’avère être elle-même une ancienne journaliste reporter prise en otage en Afghanistan, on devine très bien d’ailleurs qu’elle soit légitiment sujette à des états de stress post-traumatique.
Le reste de l’histoire reste extrêmement flou et vaporeux (c’est le cas de le dire) comme si les autrices n’étaient pas encore persuadées de la marche à suivre pour les épisodes à venir et attendaient un retour de la part du lectorat et des critiques. Beaucoup de données différentes sont mises en avant de manière assez foutraque, alors qu’un numéro classique d’exposition pour un nouveau personnage sur une série culte et appréciée – autant par les lectrices que les lecteurs- aurait très ben fait l’affaire.
En somme, pourquoi aiguiller (ou matraquer) le lecteur vers autant de pistes diverses et d’informations succinctes, alors que si on était plus sur de soi (ou si on avait beaucoup moins la pression de la part de son éditeur, je suis pas débile, je sais lire à travers les lignes), ce premier numéro et surtout cette nouvelle héroïne gagnerait en crédibilité.
Les illustrations de Roberta Ingranata sont également bien en dessous de ce que l’on pourrait attendre du reboot d’une telle série.
Les décors sont quasi inexistants, les visages des personnages masculins complément limitrophes hormis quelques cicatrices faciales, et le style de l’artiste n’est pas sans rappeler celui de Laura Braga, qui officiait sur la fin de la série précédente.
Pour le moment, tout me parait faux et surjoué dans cette nouvelle version de la série Witchblade. Et quelque part, cela en est aussi insultant que de foutre Pez à poil il y a 20 ans de cela. Je ne dis pas ça par nostalgie. Je ne fais que comparer les 1er numéros de chaque grand arc les plus notables de la série, ceux-ci sont bien plus structurés, posés. Là on sent bien l’urgence de faire du reboot de cette série le nouveau terreau complètement hypocrite d’un mouvement féministe dans les comics de la part d’un éditeur indé.
Mais putain, Top Cow était déjà dans la place dès le #80 de Witchblade en 2004… Qui se souciait sérieusement du féminisme dans les titres de super héroïnes à cette époque hormis DC via l’inspiration de Gail Simone ?
Pourquoi remanier en moins bien un mouvement déjà en marche grâce à ses lecteurs ? Pourquoi contribuer à faire en sorte que par opposition, le good girl art institué sur ce titre depuis la fin des années 90 reste la référence absolue ?
Il est certes encore trop tôt pour émettre un avis définitif de ma part sur ce titre, mais… Au regard de ce premier numéro je suis très loin de valider cette nouvelle direction éditoriale de la part de Top Cow.
j’aimais beaucoup l’univers Top cow de la belle époque, en particulier Witchblade et Darkness, mais là pour le coup, bof bof en effet. Je m’en vais relire mes Green lantern tient!