Je n’ai actuellement pas de mots assez forts, assez pertinents pour décrire toute la tristesse et l’effroi qui me lacèrent le cœur depuis les événements du vendredi 13 novembre. Alors au lieu d’essayer d’exprimer maladroitement ce que d’autres sont parvenus à faire depuis, avec la justesse et le recul nécessaire, j’ai décidé de dédier tout simplement ce prochain billet à toutes celles et ceux qui ont été touchés de près ou de loin par cette ignominie (oui je sais, il s’agit d’à peu près tout le monde…), et à deux personnes en particulier qui n’auront pas de mal à se reconnaître.
Sachez tous les deux que je suis extrêmement fière d’être votre amie. Je vous aime. We soldier on.
Soyons unis pour être forts, et soyons unis pour être heureux !
Victor Hugo
Dans le premier volume de The Infinite Loop, nous faisions la connaissance de Teddy, qui parcourait les époques traquant les anomalies temporelles jusqu’à ce qu’elle tombe sur la plus craquante d’entre elles. Ano allait en effet bouleverser sa vie et ses principes, formatés par le conformisme et l’éradication totale de tout sentiment amoureux. La fin du tome 1 nous présageait alors une mise à l’épreuve et un combat dantesque pour notre héroïne, et force est de constater que la suite de cette mini-série comprenant au total 6 numéros chez IDW et publiée chez nous par Glénat Comics, n’a absolument pas mis à l’écart son aspect revendicatif, bien au contraire.
A vrai dire, il est certain que l’on pourrait me reprocher de faire l’éloge gratuitement d’un titre auquel j’ai grandement participé, non seulement dans son financement et sa promotion, mais également lors de ma contribution en terme d’écrit concernant le premier volume. Evidemment, je considère Pierrick et Elsa comme de très bons amis. J’éprouve même envers Pierrick une affection toute particulière. Moi la (pseudo) vieille goudou retranchée dans son appartement avec ses chats et vivant en face d’un cimetière, et lui, le jeune freluquet à la gueule d’amour et à la langue bien pendue, nous passons beaucoup de temps ensemble à discuter, échanger, et en plus comme de vrais cochons, on aime faire ça. Nous avons des vies et des parcours très différents, et cela ne nous empêche pas pour autant d’apprendre constamment l’un de l’autre.
The Infinite Loop parle exactement de ça, du fait que tous ensemble malgré nos différences nous sommes plus forts face à un but commun, celui de la tolérance (ce terme qui de nos jours ne veut pratiquement plus rien dire, n’est-ce pas ?), de l’amour, du respect des façons de vivre de chacun.
Autant le premier tome introduisait vraiment une ambiance particulière, une atmosphère un peu désuète qui pouvait légitiment en dérouter plus d’un, autant celui-ci ne laisse plus aucune ambiguïté, il s’agit bel et bien de la narration d’un combat et métaphoriquement des difficultés de parvenir à se définir et être heureux, en tant qu’être humain hors norme dans un système technocratique qui au final ne souhaite que vous éradiquer.
Personnellement je comprend très bien ces choses là, je n’ai même pas besoin de métaphores ni de futurs alternatifs. The Infinite Loop traduit parfaitement au final mon histoire au quotidien, j’y trouve en tout cas très facilement des passerelles sans aller y chercher très loin, et c’est pour cette raison que j’adhère tant à cette oeuvre.
Mais évidemment il ne s’agit pas que de moi, ni de toutes les personnes qui ont eu la gentillesse et surement le courage de laisser leur témoignage poignant publié à la fin de ce second ouvrage. TIL se permet aussi de toucher toutes les minorités qui ont subi une quelconque injustice, et tout ceux qui sont solidaires de nos différences.
Le propos peut paraître maladroit, redondant, outrancier, il est surtout le fruit de l’imagination d’un jeune homme plein fougue et de malice, totalement concerné par son sujet, ce qui est loin j’en suis sure d’être le cas de certains scénaristes. The Infinite Loop rappelons-le n’est pas une oeuvre de commande de la part d’un éditeur quelconque, il s’agit d’une oeuvre personnelle qui se veut être à la fois vivante et réfléchie, elle a le dynamisme et la jeunesse de ses auteurs, elle a également (et surtout) la maturité de vouloir englober dans son dessein la lutte contre TOUTES les inégalités en faisant notamment référence à des figures emblématiques qui ont marqué l’histoire en ce domaine : Malcom X, Harvey Milk, Jean Jaures, Susan B. Anthony pour ne citer qu’eux.
Ainsi, comment ne pas tomber amoureuse de Teddy et Ano ?
Ce second volume nous permet aussi de voir à quel point Elsa Charretier a progressé de manière fulgurante dans son art, certaines de ses planches sont extrêmement travaillées, tout en gardant la vision épurée qui fait son style, et on sent bien que l’artiste prend son pied à vouloir faire virevolter son héroïne principale dans tous les sens (c’est à dire dans l’espace, mais aussi dans le temps).
The Infinite Loop est donc une oeuvre beaucoup plus complexe qu’il n’y parait. Elle est tout d’abord le fruit du travail collectif d’un binôme d’auteurs très inspirés (et très inspirants), mais c’est également une oeuvre à la fois très actuelle (je me suis mise à glousser plusieurs fois devant les gimmicks et autres vannes qui ne perdront pas une ride dans quelques années tant elles sont bien senties), tout en rendant hommage à ceux qui luttent contre les inégalités depuis des siècles. Et cela fait un bien fou de voir que de nos jours le combat continue, comme si il s’agissait juste de concevoir notre humanité et notre capacité de trouver l’espoir dans celle-ci, malgré tout.
Cette expérience collaborative sur The Infinite Loop a t-elle fait naitre chez toi l’ambition de devenir scénariste de comic books ?
A vrai dire j’ai écrit plusieurs histoires, comme ça pour m’amuser alors qui sait, peut être qu’un jour…