Porcelaine Tome 1 : la review de Julien Lordinator

Rapide Review  : Porcelaine Tome 1, Gamine

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Il y a en ce moment une mode de livres destinés au jeune public surfant sur une vague d’imagerie gothique : On voit fleurir sur les étalages des libraires des ouvrages peuplés de petites filles en robe en dentelles noires au physique « Tim Burton-ien », dans des récits pleins d’histoires de gentils fantômes, d’ours en peluche qui parlent et de chats noirs. Même si tout n’est pas bon à jeter dans cette mode (je conseille notamment le sublime End de Barbara Canepa et Anna Merli), il faut reconnaître que le nombre de ces récits ne jouent pas en la faveur de ces livres, un phénomène de mode entraînant rarement un pique de qualité dans son sillage… Qu’est-ce qui fait alors que Porcelaine mérite plus d’intérêt que les autres livres de cette mouvance  ? Et bien plusieurs choses, que je vais essayer de détailler ci-dessous.

Même si manifestement et honnêtement l’arrivée de la traduction de cette bande dessinée dans notre pays est due à cette mode des ouvrages emo-gothique (le titre original est d’ailleurs A Gothic fairy Tale), doit-on pour autant le cataloguer comme tel  ? Il faut se méfier des apparences car sous son aspect opportuniste, Porcelaine est bien plus que ça.

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Porcelaine raconte l’histoire d’une fillette des rues sobrement appelée La Gamine, alors qu’elle s’introduit par effraction dans la demeure d’un riche excentrique, ce dernier se prend d’affection pour elle et décide d’en faire sa pupille. L’homme est en fait un inventeur-alchimiste, capable de donner vie à des créatures de porcelaine, vivant seul entouré de ses créations, pleurant le décès de sa femme. Une relation fusionnelle d’amitié va alors naître entre ces deux êtres abandonnés, mais (parce qu’il y a toujours un mais dans ce genre d’histoire), l’affable vieil homme cache un terrible secret, symbolisé par une lourde porte verrouillée dans son atelier. Vous devinez la suite, la curiosité de la gamine va vite faire le reste et mettre en branle une série d’événements plutôt fâcheux…

3On retrouve donc la plupart des poncifs de ce genre de récit  : Une jeune héroïne, des personnages et environnements néo-gothiques, du surnaturel et une pointe de morbide. Cependant et comme je l’ai déjà dit plus haut, Porcelaine est un livre qui sort du lot. D’une part pour son esthétique, contrairement à la grande majorité de ce genre d’histoire, visuellement les teintes sont très claires, avec une prédominance de blanc et de gris, les personnages ont des physiques fantaisistes, à mi chemin entre Tim Burton (encore lui) et certains mangas.
Personnellement (et même si en général je rechigne à faire des rapprochements entre des médias différents), le style graphique et visuel de Chris Wildgoose pour ce livre m’a beaucoup rappelé le style de American McGee, artiste célèbre pour ses deux jeux vidéo inspirés par l’univers d’Alice au Pays des Merveilles (American McGee’s Alice et Alice, Retour au Pays de la Folie), on y retrouve notamment ces physiques oblongs, aux membres fins et aux têtes et torses démesurés.
Visuellement, Porcelaine est donc une œuvre à part, loin des codes inhérents du comic et même d’une grande partie de la bande dessinée en général, privilégiant le réalisme, elle est même plus proche de ce que l’on peut voir du coté de la bande dessinée franco-belge, tout en gardant néanmoins sa personnalité et son originalité.

Pour ce qui est de l’histoire, même si dans le fond le récit reste assez classique et respecte à la lettre les codes de ce genre de récit, Benjamin Read réussi malgré tout à rendre son récit intéressant et prenant, surtout grâce à ses personnages, immédiatement attachants, voir clairement touchants. On tombe ainsi tout de suite sous le charme de la gamine, fillette naïve et audacieuse et du vieil homme, mélancolique et mystérieux, un duo certes aux antipodes mais dont les deux caractères se complètent à merveille.

Malgré une trame assez classique, Benjamin Read livre donc un récit à la fois passionnant, intriguant et touchant, une grande réussite.

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Un petit mot sur l’édition française pour finir, c’est l’éditeur Delcourt qui se charge de l’édition dans la langue de Molière et comme souvent, la qualité est au rendez vous  : Couverture dure, grand format, papier glacé, le savoir faire et le sérieux de l’éditeur est toujours aussi admirable.

Idem pour la traduction, du Studio Makma et Mathieu Auverdin, absolument impeccable.
Une VF donc irréprochable pour ce graphic novel d’exception qui n’en méritait pas moins.

Les apparences sont donc parfois trompeuses : Derrière son aspect de bande dessinée opportuniste profitant d’un phénomène de mode, Porcelaine est en fait une œuvre singulière, à l’écriture maîtrisée et à l’aspect esthétique original. Une véritable perle, qui à l’image de ladite pierre précieuse, l’on aimerait découvrir plus souvent.

Porcelaine Tome 1 – Gamine, de Benjamin Read et Chris Wildgoose, disponible depuis le 17 septembre chez Delcourt dans la collection Contrebande.

Note  : Un tome 2, intitulé  Femme est en préparation.

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